PLACE GANDA FADIGA À PARIS : LE NOM DE GANDA FADIGA S’INSCRIT DÉSORMAIS DANS L’HISTOIRE PARISIENNE

Rédigé le 26/09/2025
Mamadou SOW


Paris, 25 septembre 2025 – Ce jeudi après-midi a été marquée par un moment fort dans le 18ᵉ arrondissement de la capitale. En présence d’un public dense et ému, de représentants des diasporas ouest-africaines, d’élus, d’artistes et de la famille de l’illustre griot, la place Ganda Fadiga a officiellement été inaugurée dans le quartier de la Goutte d’Or.


Un hommage qui prend place dans la ville

La dénomination de cette nouvelle place du 18ᵉ n’est pas un coup de communication. Elle s’appuie sur une délibération adoptée le 6 juin 2025, actant la création d’une voie portant le nom de Ganda Fadiga dans le secteur de l’intersection des rues Myrha et Léon, en plein cœur de la Goutte d’Or. Le Conseil d’arrondissement du 26 mai 2025 avait d’ailleurs voté favorablement ce choix, dans un mouvement de mémoire, de culture et d’inclusion urbaine. Mairie de Paris 18ᵉ

Pour les habitants, les promeneurs ou encore les membres de la diaspora soninké, cette place veut être plus qu’un nom : un point de repère, un rappel que la culture migrante, orale et musicale s’inscrit légitimement dans le paysage urbain parisien.


 



Qui était Ganda Fadiga ?

Avant de revêtir une dimension symbolique, ce projet repose sur une figure : Ganda Fadiga (1949–2009), griot soninké d’origine malienne.

Une biographie tracée entre tradition et engagement

  • Il naît en 1949 dans le village de Maréna (actuelle République du Mali) où, dès son plus jeune âge, il est initié à l’art du gambaré, instrument à cordes traditionnel.

  • Il étudie notamment sous la direction du griot Diadia Sira, maître aussi de son père Demba Fadiga.

  • Au fil des années, il compose un répertoire riche d’une centaine de titres, parcourant les thèmes de la bravoure, de l’humilité, de la solidarité, de la mémoire collective.

  • Sa voix et ses récits, souvent diffusés « de foyer à foyer » dans les communautés migrantes en France, deviennent des repères pour des générations d’auditeurs.

  • Mais Ganda Fadiga n’était pas seulement artiste : il jouait aussi un rôle social et médiateur, notamment parmi les migrants ouest-africains à Paris.

  • Il s’éteint le 19 septembre 2009 à Paris, laissant derrière lui un héritage musical et culturel.

À travers le monde, la figure de Ganda Fadiga incarne cette identité soninké plurielle, à la croisée des mémoires, des langues et des migrations.


 



L’inauguration : discours, émotions et symboles

Un moment de forts propos et de reconnaissance

Les prises de parole lors de l’inauguration ont mis en lumière plusieurs axes :

  1. La mémoire collective locale
    Les intervenants ont rappelé comment Ganda Fadiga, arrivé à Paris en 1967, a fait du 18ᵉ arrondissement sa « terre d’accueil » et son espace d’expression. Il s’est attaché à la Goutte d’Or, à ses foyers de travailleurs, à ses habitants.

  2. La langue comme lien universel
    « La musique, c’est une langue à la Goutte d’Or », a été l’un des leitmotivs. L’idée est que, par son art, Ganda Fadiga a su faire dialoguer les traditions, les différences culturelles, et créer une langue commune au sein de la diaspora.

  3. Un geste symbolique fort
    Plusieurs orateurs ont souligné qu’attribuer un nom à un espace public, c’est donner à cette vie — ici celle de Ganda Fadiga — une place dans la mémoire collective, lui offrir une permanence visible. Ce n’est pas que symbolique : il s’agit de transmettre des modèles aux générations futures.

  4. La présence des communautés soninké d’ici et d’ailleurs
    Étaient présents des délégations du Sénégal, de la Gambie, de la Mauritanie, de la Guinée, et d’autres pays de la diaspora. Le lien transnational s’est exprimé par des hommages, des bénédictions, des chants.

  5. Actes symboliques
    — Le dévoilement officiel de la plaque « Place Ganda Fadiga 1949-2009, griot soninké » fut un moment solennel.
    — La famille a remis au maire et aux élus un gambaré — l’instrument traditionnel — comme gage de lien avec l’héritage du maître.
    — Des prix et distinctions ont été distribués en hommage à la mémoire et à la continuité.

Temps forts en images et vidéos

L’événement a été relayé en direct et en différé sur les réseaux et plateformes. Par exemple :

  • Une vidéo de l’inauguration en direct sur La Chaîne Soninké est accessible, posant la scène et les discours.

  • Un clip YouTube « Inauguration de la place Ganda Fadiga à Paris » documente les moments clés.

  • Le compte Instagram officiel annonçait l’événement autour du 25 septembre 2025, plaçant l’inauguration dans le cadre de la Journée internationale de la langue soninké.

Ces diffusions ont permis à un public plus large, parfois éloigné géographiquement, de participer virtuellement à l’hommage.


 



Sens, enjeux et perspectives

Une place dans l’espace urbain, mais aussi dans les consciences

La création de la place Ganda Fadiga s’inscrit dans une démarche plus large de reconnaissance culturelle à Paris. En choisissant de dédier des espaces publics à des figures issues de la migration, la municipalité du 18ᵉ (et le Conseil de Paris) montrent leur volonté de redéfinir les repères mémoriels de la ville.

Pour les communautés soninké et ouest-africaines, cette place symbolise une victoire — non pas seulement culturelle, mais civique. Elle affirme que leurs récits, leurs langues et leurs artistes ont aussi une place dans le récit parisien.

Entre local et global

Même si la place est située en Goutte d’Or, son message est universel. Le nom de Ganda Fadiga trouvera écho parmi les diasporas, les mélomanes, les chercheurs de mémoire. Les discours d’inauguration l’ont bien montré : on ne célèbre pas seulement un homme, mais une voie, une langue, une mémoire vivante.

La coïncidence n’est pas anodine : l’inauguration intervient à la date de la Journée internationale de la langue soninké, ce qui donne une portée symbolique plus forte encore à l’acte. 

 


Défis et ambitions

Quelques pistes de réflexion se dégagent :

  • Faire vivre la place
    Au-delà du moment inaugural, il faudra que cet espace devienne un lieu d’animation, de mémoire, de transmission : concerts, rencontres, ateliers, balades culturelles, médiations entre habitants.

  • Rendre accessible l’héritage
    Il sera important de proposer des dispositifs pour faire connaître la vie, l’œuvre et la langue de Ganda Fadiga, notamment aux plus jeunes, par des panneaux explicatifs, une signalétique culturelle, des parcours dans le quartier.

  • Conserver le lien avec les communautés
    Que cette place ne reste pas une « carte postale mémorielle », mais une invitation à la fraternité, au dialogue interculturel. L’implication continue des associations soninké et ouest-africaines sera déterminante.

  • Inspirer d’autres hommages
    Si cette démarche trouve sens, elle pourrait être un modèle pour d’autres arrondissements, villes, et pour d’autres figures culturelles migrantes méritant reconnaissance.


 


Ce 25 septembre 2025 marque un tournant : la Goutte d’Or intègre officiellement dans ses rues la voix d’un griot, désormais inscrit pour toujours dans l’espace public parisien. Mais ce geste d’hommage ne se suffit pas à lui-même il doit être le point de départ d’un engagement autour de la mémoire, de la culture et du vivre-ensemble.

Les discours tenus ce jour-là l’ont rappelé : donner un nom, c’est inviter à raconter une histoire. Nommer une place Ganda Fadiga, c’est affirmer que la mémoire des voix migrantes, des langues orales, des musiques traditionnelles a sa place dans la cité.